-->
"C’en est trop je vais finir
par taper du poing sur le comptoir. Mais qui sont ces pisses-flotte
inquisiteurs ? Ces technocrates voraces, ces rapaces sans vergogne qui
veulent fouler aux pieds notre droit de fumer, de boire et de manger ?
La
moustache déjà frémissante lorsque j’apprenais qu’il faudrait une heure de
travail supplémentaire pour me payer un paquet de cigarette, c’est toute mon
épaisse chevelure qui se dresse sur ma tête quand j’entends mes compagnons de
bistrot évoquer une nouvelle taxe sur la bière.
Hirsute,
je sors pour crier mon indignation à la terre entière. J’en profite aussi pour
acheter le journal et vérifier les dires de mon camarade au teint rougeaud,
dont les déclarations ne brillent pas toujours de véracité.
Par
Jupiler, il disait vrai !
Cette
taxe sur la mousse me fiche une sacrée frousse, surtout qu’elle n’est là que
pour remplir les bourses d’un état à nos trousses. Quel vice les pousse à
attrister les frimousses de gens honnêtes qui l’aiment tantôt blonde tantôt
rousse ?
Maudits
soyez vous ennemis de la tradition, de la fraîcheur à bulles, et du houblon
doré. Aux armes brasseurs, le jour de boire est arrivé.
Ils
cherchent des écus à n’importe quel prix. Celui de notre bien être semble
minime pour ces privilégiés dont le « travail » est de plus en plus
compliqué à cerner, mais de plus en plus facile à critiquer.
Le
fric, toujours le fric! Dans un bureau luxueux paré des dorures de la
République, ces cochons truffiers de la gabelle, réfléchissent activement à un
moyen efficace de racler notre porte-monnaie. En effet, les électeurs sont un
luxe qu’il faut payer le prix fort. Une nouvelle taxe est dans l’incubateur,
qui ne servira à rien d’utile, et sera engloutie dans un des nombreux déficits
dont est criblé le pays. L’un d’eux, col serré à outrance, le visage blafard,
les joues creusées, une cravate sombre, un front démesuré et dégarni, lâche de
sa voix grinçante ; « Nous n’avons qu’à taxer la bière ». Les
autres exultent, ils rient aux éclats.
Ils
viennent de trouver une taxe quasi universelle, qui une fois entrée en vigueur
rendra notre docilité encore plus probante. Tels des sportifs de très haut
niveau, nous sommes entrainés à encaisser des hausses du gaz, de l’électricité,
du prix exorbitant des billets de trains, le tout doublé d’un effondrement de
la qualité.
Ils
ont raisons ces loups déguisés en bergers, nous sommes soumis, imposables à
souhait. Fort de cela, ils enfoncent le clou sur les cigarettes, pour voir à
quel point nous sommes bien dressés, le peuple remercie, il connaît bien son
rôle !
Mais
160% nom d'une pinte, est-ce bien raisonnable ? Dans une période tendue, ou tout doit être
taxé. Ils essaient, ils martèlent, ils créent des diversions, jusqu’au point de
rupture, ou le désordre l’emporte. Grogner ne suffit pas la technique est trop
forte.
Pas concernés ? Vous
l’êtes ! Aujourd’hui c’est la bière, demain ce sera les couettes de votre
maison secondaire. « Il faut bien de l’argent pour faire marcher l’Etat.
». S’il en gaspillait moins, il tiendrait déjà debout.
La
bière prend dans ma vie une place importante, autant que le pinard, ou les
aliments gras. Si je ne suis pas entré au monastère, ce n’est certainement pas
pour qu’au dehors je sois privé des petits plaisirs de l’existence qui
atténuent les douleurs de la vie, et permettent de partager.
Il
s’agit bien de cela en effet. Qui offre une cigarette sans sourciller de nos
jours ? Comme toutes les choses qui se partageaient dans la bonne humeur,
et tissaient un lien même éphémère, au moins bienveillant entre les personnes,
la bière va devenir un produit inaccessible, et l’on ira plus boire de canons
avec les gars du village, on restera chez soi gavé par la télé, d’une
instruction malsaine et unilatérale. Fini les joies de l’échange,
l’interactivité, à moins de vouloir se payer des verres d’eau du robinet !
Je
défendrai la bière goutte que goutte, et vous feriez bien d’en faire autant.
Vous allez voir que cette bande
de pingouins soi-disant démocrates ont l’imagination si fertile qu’un jour où
l’autre on verra naître un permis de péter !"
Marc. D